Monday, April 26, 2010

Zarqa:Berceau du salafisme jordanien



La ville jordanienne de Zarqa défraie la chronique internationale depuis déjà des années. En effet, c’est dans cette ville que des de nombreux salafistes, prônant un islam plus radical, sont nés. Le plus illustre portait le nom d’Abou Missaab al-Zarqaoui. Aperçu.

Occupant un territoire triangulaire, se prolongeant de la capitale jordanienne Amman jusqu’à la frontière saoudienne, Zarqa, la ville «bleue», est un paysage minéral façonné par des blocs de gravas, semblant se reproduire à l’infini. Dans cette cité de près d’un million d’habitants, les femmes sont entièrement voilées de la tête aux pieds. De temps à autre, des femmes revêtues de la burqa noire (un vêtement atypique dans ce pays qui pratique un islam modéré) les doigts recouverts de longs gants sombres, circulent dans la rue, accompagnées d’hommes en salwar Qamiz. Ce vêtement, un ensemble pantalon-chemise longue, est l’habit préféré des islamistes pakistanais et des salafistes qui se revendiquent d’un islam pur.
«C’est dans les années 80 que le mouvement salafiste du Tabligh wa Daawah, (L’appel à l’islam) apparaît dans les rues de Zarqa», déclare le professeur Mohammed Masri du centre d’études stratégiques à l’Université jordanienne. Ce courant est concomitant à la guerre d’Afghanistan contre l’Union soviétique (1979-1989) qui constitue une page tournante dans l’inconscient collectif islamiste. «Le Salwar Qamiz remplace alors graduellement l’habit bédouin dans cette région», explique le professeur Masri.
L’invasion de l’Irak par les forces américaines en 2003, radicalise la rue arabe. Zarqa n’échappe pas à la poussée des extrémistes qui trouvent un terreau fertile dans cette ville ouvrière à grande concentration palestinienne et fortement marginalisée. Abou Missaab al-Zarqaoui, commandant d’al-qaïda en Mésopotamie et né Ahmad Fadil al-Nazal al-Khalayleh, endosse la responsabilité des attentats simultanés de trois hôtels à Amman en 2005, qui font 54 morts. Zarqaoui tient son nom de la ville bleue dont il est originaire. Mais il n’est pas le seul jordanien accusé de terrorisme, à être natif de cette région. En effet, Humam Khalil Abu-Mulal al-Balaawi, l’auteur de l’attentat suicide du 30 décembre 2009, ayant causé la mort de neuf personnes sur une base américaine en Afghanistan, est lui aussi, originaire de Zarqa. Al-Balaawi, jeune médecin jordanien, devient après l’invasion américaine de l’Irak un fervent supporter d’al-Zarqaoui, avant de se convertir à l’islam Jihadiste. Le médecin de 32 ans est engagé par les services de renseignements jordaniens pour espionner les moudjahidins au Waziristan (zone tribale pakistanaise) et en Afghanistan. Chargé de rencontrer des agents de la CIA en Afghanistan, il décide, après avoir consulté le conseil de la Choura d’al-qaïda, de venger la mort de Zarqaoui dans un attentat suicide, le 30 décembre 2009.

Selon une étude entreprise en 2006, près de 30% des habitants de Zarqa, interrogés après la mort d’Abou Missaab al-Zarqaoui, auraient considéré la mort du terroriste comme «une mauvaise chose». «Près de 5% à 7% de ces personnes ont ajouté partager les valeurs de Zarqaoui. Ce qui veut dire que près de 7% de la population de Zarqa, pourrait en théorie, adhérer au salafisme-jihadiste», souligne une source s’exprimant sous couvert d’anonymat.
Le Front d’Action Islamique (FAI), Jamaat al-Amal al-Islami, la branche politique des Frères musulmans, perdrait du terrain face aux factions les plus radicales. «Les manifestations de ce parti rassemblaient par les passé des milliers de protestataires, alors qu’aujourd’hui, elle n’en n’attirent que quelques centaines», ajoute le professeur Masri. L’islam des frères musulmans serait-il en perte de vitesse? Mohammad Zayoud, représentant du FAI à Zarqa, se contente de commenter: «Les salafistes de Zarqa ne font pas de politique, ils existent en marge de la société». Inquiétant, lorsque l’on sait que les salafistes radicaux préfèrent généralement ne jamais se mêler à la société civile, accusée «d’apostasie»… Publié dans Magazine le 23 Avril

Monday, April 12, 2010

Le retour en force de Osbat al-Ansar


Des braises incandescentes se consument sous la cendre du camp de Ain el-Helweh, victime dernièrement de bouleversements politiques successifs.

La confrontation le 15 février dernier entre des islamistes appartenant au mouvement radical de Osbat al Ansar - fondé par Hisham Chreidi dans les années 80 et aujourd’hui dirigé par Abou Tarek-ayant causé la mort d’une femme palestinienne, a fait naître de nombreuses interrogations au sein de l’armée Libanaise. « Pour la première fois depuis des années, les corps d’élite de l’armée ont dû être déployés près de deux semaines durant, autour du camp de Ain el Helweh», commente une source militaire s’exprimant sous couvert d’anonymat.

Les commandements des forces d’élite ont donc mis en place un plan d’intervention dans l’éventualité d’une dégradation de la conjoncture sécuritaire, à l’intérieur du camp. « Les obstacles que l’armée serait amenée à surmonter dans le cadre d’une telle opération militaire sont nombreux. Le camp de Ain el Helweh héberge de nombreux combattants et repris de justice, recherchés par la police libanaise, qui se battraient à mort, si un combat se déclarait entre les Palestiniens et l’armée libanaise », souligne la source militaire. Cette dernière estime que le camp de Ain el Helweh dispose de nombreux bunkers et passages souterrains ayant résisté aux diverses invasions et bombardements israéliens, un atout de plus en faveur des Palestiniens. « La topographie du terrain avantage cependant l’armée, le camp de Ain el-Helweh se trouvant dans une plaine surmontée par une colline où se situe le camp de Miyeh Miyeh, position relativement facile à occuper », déclare l’officier.

La situation entre le Fatah et Osbat al-Ansar est telle que la milice dépendant de l’Autorité palestinienne a été contrainte, le mois passé, de se replier autour des positions de l’armée, situées aux alentours du camp, affirme l’officier libanais. « La situation dans le camp est devenue inquiétante, bien qu’elle se soit nettement calmée la semaine passée depuis l’intervention de la classe politique Saidaouite », signale la source militaire. En effet la discorde s’est temporairement apaisée depuis la médiation initiée par le député sunnite du Courant du Futur Bahia Hariri, du mufti de Saida et du Hezbollah chiite.

« La montée en force du Osbat al-Ansar est aujourd’hui une réalité », explique la source militaire. « Lors des derniers combats qui ont eu lieu entre le Fatah et la mouvance islamique, nous avons observé dans cette dernière, un nombre grandissant de combattants tous armés d’un matériel coûteux et perfectionné. Ils semblent également posséder une quantité de munitions importantes, ce qui n’était pas le cas par le passé », dixit la source.

Les militants seraient également mieux formés au combat que les membres du Fatah Palestinien. En effet les combattants du Fatah exercent un autre métier pour la plupart, tel chauffeur de taxi ou maraîchers. Ils sont moins bien entraînés que les islamistes et ne disposent pas d’autant d’équipement militaire. « Les plus féroces militants de Jound el Cham - le mouvement jihadiste salafiste palestinien se revendiquant de Fatah al Islam, un groupe terroriste ayant combattu l’armée libanaise en 2007- ont rejoint les rangs de Osbat al Ansar, depuis le démantèlement de leur cellule », raconte l’officier.

L’écartement, par l’Autorité palestinienne, de Mounir Maqdah, commandant du Kifah Moussalah, considéré comme une pierre angulaire de la sécurité du camp ne présage rien de bon et pourrait sans doute causer une nouvelle vague d’attentats. Et les déchirements que connaît le Fatah peuvent laisser libre court à l’hégémonie grandissante de Osbat al Ansar. Mona Alami, Mars 2010 Publié dans Magazine