Bachar al-Assad va sans doute parvenir à s’accrocher au pouvoir encore
quelques années. Mais le régime est très affaibli, il n’a plus la
capacité de verrouiller le pays sur le plan sécuritaire : violences et
attentats à la bombe vont donc se poursuivre comme au Liban durant les années
de la guerre civile. Mais comme l’Irak sous Saddam Hussein, la Syrie aura le
statut de paria. La possibilité d’une "irakisation" du conflit à long-terme semble toutefois peu probable, les proportions démographiques n’étant pas les mêmes. Il est vrai qu'il existe un déséquilibre militaire (en faveur des Alaouites), mais le déséquilibre démographique est par contre nettement en faveur des sunnites ce qui raccourcira sans doute la durée du conflit civil…
Showing posts with label Liban. Show all posts
Showing posts with label Liban. Show all posts
Thursday, May 10, 2012
Wednesday, March 28, 2012
Une cellule salafiste aurait infiltré l’armée
Le démantèlement d’une cellule salafiste-jihadiste au sein de l’Armée libanaise, ce mois-ci, met en évidence la polarisation grandissante de la société et la fragilité de la situation sécuritaire sur la
scène locale.
En début de mois, la bombe explose dans la presse: sept personnes dont deux militaires libanais, auraient planifié des attentats contre des casernes de l’armée, une institution qualifiée
d’«hérétique» par la cellule. Une information confirmée, le lendemain, par le Premier ministre, Nagib Mikati.
«Moustapha Azzo, Alaa Kenaan, Amjad Rafeh, Raëd Taleb et Mahmoud Baraini seraient au nombre des civils accusés d’appartenir au groupuscule», signale une source salafiste. Toutefois, Magazine n’a pas été en mesure de confirmer ces noms auprès de sources officielles.
Selon une source au sein de l’Armée ayant requis l’anonymat, un des soldats arrêtés serait Abdel Kader Naaman, un cadet de l’école militaire en dernière année. Le second soldat appartiendrait à l’unité d’élite des commandos marins.
Selon la source, deux autres militaires seraient toujours suspectés dans cette affaire.
Le dénommé Ali Rachid Hussein, un sunnite du Liban-Nord serait également en fuite. «Ce dernier, accusé d’appartenir à Fatah al-Islam, avait été libéré de prison lors du Ramadan dernier. Il aurait quitté le Liban depuis plus de deux mois, afin de rejoindre la rébellion syrienne. On a perdu sa trace depuis», ajoute la source. Fatah al-islam est un groupuscule terroriste palestinien qui avait combattu l’Armée libanaise en 2007.
Le dénommé Ali Rachid Hussein, un sunnite du Liban-Nord serait également en fuite. «Ce dernier, accusé d’appartenir à Fatah al-Islam, avait été libéré de prison lors du Ramadan dernier. Il aurait quitté le Liban depuis plus de deux mois, afin de rejoindre la rébellion syrienne. On a perdu sa trace depuis», ajoute la source. Fatah al-islam est un groupuscule terroriste palestinien qui avait combattu l’Armée libanaise en 2007.
Les quatre Libanais seraient affiliés aux Brigades Abdallah Azzam, une organisation palestinienne terroriste qui entretiendrait des liens troubles avec la nébuleuse d’al-Qaïda. Le chef de la cellule serait un Palestinien recherché par la justice du nom de Abou Mohammed Tawfiq Taha, résidant
actuellement dans le camp palestinien de Aïn el-Hélwé. «Abdel Kader Naaman aurait été mis sous surveillance après avoir envoyé son ordinateur à formater chez un de ses amis, également soldat. Ce dernier l’aurait dénoncé à ses supérieurs après avoir visionné des vidéos suspectes», affirme la source militaire. L’armée contrôlait également les appels téléphoniques d’Abou Mohammed Tawfiq Taha, qui serait entré en contact avec les soldats, ce qui aurait permis de faire le lien entre les différents suspects.
Selon certaines sources palestiniennes, Taha résiderait toujours dans le quartier de Safouri, situé non loin de la Rue du Marché dans le camp de Ain el-Helwé. Cet ancien membre du groupuscule terroriste Osbat al-Ansar, proche de l’organisation radicale de Jound al-Cham serait secondé par un dénommé Ziad al-Naaj. Il aurait été en contact à maintes reprises avec le chef d’Al-Qaïda,
Ayman al-Zawahiri.
Abdel Kader Naaman aurait été endoctriné au jihadisme takfiri par son frère, un cheikh salafiste, affirme-t-on dans les milieux de l’armée. Une information toutefois réfutée par la source salafiste
précitée, qui insiste sur le fait qu’aucun «imam de ce nom n’existe au sein de la communauté». Des informations également en contradiction avec celles publiées par al-Akhbar qui souligne que R.T. (Raed Taleb) aurait rencontré Taha sur des sites jihadistes. Raëd Taleb et Amjad Rafeh ainsi que M.Kh.A (Magazine n’a pu obtenir ce dernier nom, susceptible toutefois d’être celui de Moustapha Azzo) auraient reçu une formation sur la fabrication d’engins explosifs improvisés à Aïn el-Hélwé. Raëd Taleb serait également un ami de longue date de l’élève-officier Naaman.
Les deux militaires avaient pour mission de déceler une faille quelconque dans le système sécuritaire de leur caserne afin de pouvoir y introduire les explosifs destinés à une opération terroriste.
Selon As-Safir, le cadet aurait admis qu'il s’apprêtait à mener une attaque terroriste contre l'école militaire. Un autre attentat visant la base militaire de Halat aurait également été envisagé.
«A Tripoli, des membres de la communauté salafiste arguent toutefois que les membres présumés de cette cellule seraient en fait des partisans de l’opposition syrienne. En ce qui nous concerne, nous sommes opposés à tout plan visant à déstabiliser l’Armée libanaise», explique
le cheikh salafiste, Nabil Rahim.
L’infiltration de l’armée par des éléments subversifs, motivés par des croyances religieuses extrémistes, met en exergue les risques que pose le manque de cohésion nationale et identitaire
pour le Liban. Un signe précurseur des dangers qui guettent le pays du Cèdre, qu’à leur habitude nos élus prendront sans doute bien soin d’ignorer. Mona Alami pour Magazine.
«A Tripoli, des membres de la communauté salafiste arguent toutefois que les membres présumés de cette cellule seraient en fait des partisans de l’opposition syrienne. En ce qui nous concerne, nous sommes opposés à tout plan visant à déstabiliser l’Armée libanaise», explique
le cheikh salafiste, Nabil Rahim.
L’infiltration de l’armée par des éléments subversifs, motivés par des croyances religieuses extrémistes, met en exergue les risques que pose le manque de cohésion nationale et identitaire
pour le Liban. Un signe précurseur des dangers qui guettent le pays du Cèdre, qu’à leur habitude nos élus prendront sans doute bien soin d’ignorer. Mona Alami pour Magazine.
Monday, December 13, 2010
Sécheresse et sécurité alimentaire : baisse de la production agricole de 25%
En 2008, un rapport de FAO prévenant que l’agriculture au Proche-Orient allait «pâtir de la hausse des températures» avait tiré la sonnette d’alarme. En cette fin d’année 2010, ces pronostics apocalyptiques semblent déjà se confirmer au Liban. Sécheresses, inondations et dégradation des sols menaceraient la sécurité alimentaire de nombreux pays au Moyen-Orient dont le pays du Cèdre.
«Le baromètre a enregistré cet été des pics de 47 degrés dans la plaine de la Békaa. C’est du jamais vu», déclare Imad Bsat, ingénieur agronome et propriétaire de B-Fresh Produce. Selon l’agriculteur, l’augmentation de la température aurait dépassé de loin les prédictions d’un réchauffement climatique de 3 degrés Celsius prévu sur 100 ans, puisque cette année déjà, il aurait dépassé de sept degrés les normales habituelles.
L’écologiste Waël Hmaydan, directeur de l’ONG IndyAct, observe une croissance de la fréquence des jours très secs et des vagues de chaleur. Les fluctuations des températures et de la proportion des précipitations ne font qu’aggraver la situation. «De plus et cela contrairement aux années précédentes, des incendies ont ravagé le Liban en plein mois de février, ce qui est un phénomène sans précédent et très préoccupant», ajoute Hmaydan.
Les témoignages des experts concordent tous: en raison des fortes chaleurs, un recul du rendement agricole dans les diverses régions libanaises est évident, il en résulterait une baisse de la production de 20 à 25 pour cent. «Les arbres se sont desséchés, et les fruits ont très souvent pourri sur les branches. La tendance pourrait avoir été exacerbée sur les côtes libanaises qui ont subi des vagues de chaleur intenses. De plus sur le littoral, de nombreux arbres fruitiers ont entamé un deuxième cycle de floraison ces deux derniers mois, en raison de la douceur du climat. Ce qui pourrait faire encore perdre aux agriculteurs autour de 5% de leur prochain rendement», dixit Bsat.
Désertification du paysage
Abou Tarek travaille la terre depuis plus de 50 ans dans la région de la Békaa. Ce robuste sexagénaire se dit préoccupé par le changement climatique, doublé d’une désertification du paysage libanais. «Il se manifeste par des écarts de températures de plus en plus importants, avec des chaleurs intenses observées durant la journée et des pics de froid au-dessous de zéro durant la nuit», se plaint-il. Pour Bsat, cette situation est d’autant plus alarmante que les journées humides et nuageuses se font de plus en plus rares. «Les baisses de températures sont également vitales pour le processus de bourgeonnement, un certain nombre d’heures dites fraîches lui étant nécessaires», ajoute-t-il.
Les conditions météorologiques extrêmes vont aussi entraîner des modifications au niveau des écosystèmes ainsi que l’apparition de nouvelles maladies et de races d’insectes exotiques. «Certains ravageurs récemment introduits au Liban détruisent les plantes et affectent notre rendement», souligne Abou Tarek. En effet cette année, des insectes qui se cantonnaient par le passé uniquement à certains arbres fruitiers comme les pêchers et les abricotiers s’attaquent maintenant à d’autres comme les pommiers. «Ce comportement est totalement inhabituel, je n’ai jamais vu cela durant mes 20 ans de carrière», confirme Bsat.
Pénurie d’eau
L’agriculteur se dit toutefois préoccupé non pas seulement par le changement climatique mais aussi par la pénurie en eau. Une opinion partagée par Abou Tarek qui constate que dans la partie orientale de la vallée de la Békaa, il est de plus en plus nécessaire d’irriguer certaines jeunes pousses, un procédé relativement neuf dans la région. «L’évolution des conditions météorologiques peut, à long terme, être gérée par une substitution de certaines cultures à d’autres plus appropriées, mais le manque d’eau est par contre plus grave», insiste Bsat.
Avec des périodes de sécheresse qui sont de plus en plus fréquentes, la pénurie en eau contraint les agriculteurs à la rationner pendant les périodes de grosse chaleur. Selon Bsat, l’irrigation des cultures qui se pratiquait traditionnellement jusqu’au mois de septembre a dû se poursuivre cette année durant la canicule de novembre.
«Une utilisation plus efficace des ressources comme l’eau (voir notre article page 37) et l’énergie, une agriculture durable, une meilleure gestion forestière et la plantation d’arbres sont des mesures fondamentales pour atténuer les effets du changement climatique», a conseillé Hmaydan. Ses recommandations semblent de plus en plus pressantes. «Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord sont tout particulièrement exposés aux pénuries d’eau. Une hausse de température de 3° C pourrait entraîner un stress hydrique pour 155 à 600 millions de personnes de plus en Afrique du Nord», estime la FAO.
«Une conservation des eaux plus adéquate est donc devenue impérative», conclut Hmaydan. Ces paroles semblent trouver un écho partout dans la région. En marge de la conférence organisée en février dernier en Jordanie sur «la sécurité alimentaire et le changement climatique dans les régions arides», Theib Y. Oweis, directeur du programme sur la gestion de l’eau et de la terre au Centre international pour la recherche agricole dans les régions arides, avait affirmé que l’eau avait aujourd’hui plus de valeur que le pétrole. Mona Alami pour Magazine
«Le baromètre a enregistré cet été des pics de 47 degrés dans la plaine de la Békaa. C’est du jamais vu», déclare Imad Bsat, ingénieur agronome et propriétaire de B-Fresh Produce. Selon l’agriculteur, l’augmentation de la température aurait dépassé de loin les prédictions d’un réchauffement climatique de 3 degrés Celsius prévu sur 100 ans, puisque cette année déjà, il aurait dépassé de sept degrés les normales habituelles.
L’écologiste Waël Hmaydan, directeur de l’ONG IndyAct, observe une croissance de la fréquence des jours très secs et des vagues de chaleur. Les fluctuations des températures et de la proportion des précipitations ne font qu’aggraver la situation. «De plus et cela contrairement aux années précédentes, des incendies ont ravagé le Liban en plein mois de février, ce qui est un phénomène sans précédent et très préoccupant», ajoute Hmaydan.
Les témoignages des experts concordent tous: en raison des fortes chaleurs, un recul du rendement agricole dans les diverses régions libanaises est évident, il en résulterait une baisse de la production de 20 à 25 pour cent. «Les arbres se sont desséchés, et les fruits ont très souvent pourri sur les branches. La tendance pourrait avoir été exacerbée sur les côtes libanaises qui ont subi des vagues de chaleur intenses. De plus sur le littoral, de nombreux arbres fruitiers ont entamé un deuxième cycle de floraison ces deux derniers mois, en raison de la douceur du climat. Ce qui pourrait faire encore perdre aux agriculteurs autour de 5% de leur prochain rendement», dixit Bsat.
Désertification du paysage
Abou Tarek travaille la terre depuis plus de 50 ans dans la région de la Békaa. Ce robuste sexagénaire se dit préoccupé par le changement climatique, doublé d’une désertification du paysage libanais. «Il se manifeste par des écarts de températures de plus en plus importants, avec des chaleurs intenses observées durant la journée et des pics de froid au-dessous de zéro durant la nuit», se plaint-il. Pour Bsat, cette situation est d’autant plus alarmante que les journées humides et nuageuses se font de plus en plus rares. «Les baisses de températures sont également vitales pour le processus de bourgeonnement, un certain nombre d’heures dites fraîches lui étant nécessaires», ajoute-t-il.
Les conditions météorologiques extrêmes vont aussi entraîner des modifications au niveau des écosystèmes ainsi que l’apparition de nouvelles maladies et de races d’insectes exotiques. «Certains ravageurs récemment introduits au Liban détruisent les plantes et affectent notre rendement», souligne Abou Tarek. En effet cette année, des insectes qui se cantonnaient par le passé uniquement à certains arbres fruitiers comme les pêchers et les abricotiers s’attaquent maintenant à d’autres comme les pommiers. «Ce comportement est totalement inhabituel, je n’ai jamais vu cela durant mes 20 ans de carrière», confirme Bsat.
Pénurie d’eau
L’agriculteur se dit toutefois préoccupé non pas seulement par le changement climatique mais aussi par la pénurie en eau. Une opinion partagée par Abou Tarek qui constate que dans la partie orientale de la vallée de la Békaa, il est de plus en plus nécessaire d’irriguer certaines jeunes pousses, un procédé relativement neuf dans la région. «L’évolution des conditions météorologiques peut, à long terme, être gérée par une substitution de certaines cultures à d’autres plus appropriées, mais le manque d’eau est par contre plus grave», insiste Bsat.
Avec des périodes de sécheresse qui sont de plus en plus fréquentes, la pénurie en eau contraint les agriculteurs à la rationner pendant les périodes de grosse chaleur. Selon Bsat, l’irrigation des cultures qui se pratiquait traditionnellement jusqu’au mois de septembre a dû se poursuivre cette année durant la canicule de novembre.
«Une utilisation plus efficace des ressources comme l’eau (voir notre article page 37) et l’énergie, une agriculture durable, une meilleure gestion forestière et la plantation d’arbres sont des mesures fondamentales pour atténuer les effets du changement climatique», a conseillé Hmaydan. Ses recommandations semblent de plus en plus pressantes. «Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord sont tout particulièrement exposés aux pénuries d’eau. Une hausse de température de 3° C pourrait entraîner un stress hydrique pour 155 à 600 millions de personnes de plus en Afrique du Nord», estime la FAO.
«Une conservation des eaux plus adéquate est donc devenue impérative», conclut Hmaydan. Ces paroles semblent trouver un écho partout dans la région. En marge de la conférence organisée en février dernier en Jordanie sur «la sécurité alimentaire et le changement climatique dans les régions arides», Theib Y. Oweis, directeur du programme sur la gestion de l’eau et de la terre au Centre international pour la recherche agricole dans les régions arides, avait affirmé que l’eau avait aujourd’hui plus de valeur que le pétrole. Mona Alami pour Magazine
Internet : une économie parallèle sous haute protection
Un secteur qui semblerait atteint de schizophrénie permanente. C’est sans doute la description la plus exacte que l’on pourrait faire du marché Internet au Liban, partagé entre fournisseurs légaux et illégaux. Objet de multiples scandales, liés à une corruption endémique, il pourrait également figurer dans un roman d’espionnage.
Une véritable économie parallèle caractérise le secteur Internet libanais, où les fournisseurs d’accès Internet (FAI) légaux ne représentent que la partie visible de l’iceberg. En effet, selon des spécialistes du cru, près de 50% des fournisseurs d’Internet au pays du Cèdre opéreraient tranquillement en toute illégalité.
Deux types de fournisseurs existent au Liban. Les FAI (fournisseurs d’accès Internet–ISP en anglais) constituent la passerelle indispensable pour permettre aux utilisateurs de naviguer sur Internet. Les fournisseurs d’accès de données (DSP) disposent de l’infrastructure spécialisée, nécessaire aux ISP pour relier les ordinateurs personnels et les réseaux Internes des entreprises, au réseau mondial. Ce service, qui est payant, transite par le ministère des Télécoms qui le fait facturer au prix fort, près de 3000 dollars pour chaque ligne E1(2Mbps). «Les DSP doivent également verser 20% de leurs revenus au ministère des Télécoms et seule l’Autorité régulatrice des télécoms (ART) peut leur accorder une autorisation de fréquence nécessaire pour installer et opérer un réseau radio de transmission de données servant les FAI ainsi que les banques et les grandes entreprises», assure un spécialiste du secteur.
Ces opérateurs légaux doivent cependant faire face à une âpre concurrence de la part d’une multitude d’opérateurs illégaux. «Ces derniers opèrent en amont ainsi qu’en aval», assure un autre spécialiste. En effet, des individus ou des compagnies se connectent à des lignes Internet de Turquie, de Chypre ou comme ce fût le cas pour l’antenne du Barouk, d’Israël, pays ennemi du Liban. Ce transit est généralement assuré par des liens Vsat ou radio, qui relient le Liban à ces divers pays.
Dans les camps palestiniens
D’autres fournisseurs Internet illégaux existeraient sur le marché local. Ainsi selon le propriétaire d’un FAI libanais, des Vsat auraient été installés dans certains camps palestiniens, à la périphérie de Beyrouth et Tripoli. Les enclaves palestiniennes échappant historiquement au contrôle de l’Etat, elles seraient donc impossibles à démanteler. «Dans ce cas particulier, les FAI ayant recours à ce type de connexion évitent de faire transiter des informations sensibles en raison du risque évident que cela pourrait poser. Elles y font donc appel pour ce qui est des activités de navigation du net», ajoute un informaticien.
Ces gros opérateurs dominant le marché en amont offrent leurs services aux distributeurs illégaux des diverses régions, qui les revendent à leur tour à des préposés ou des compagnies fournissant généralement ce service en jumelage avec celui de la télévision satellite.
Ce scénario se répète au plus bas de l’échelle du système, les petits fournisseurs obtenant également la protection des politiques, à qui ils verseraient une redevance, généralement par le biais des partis régnant dans leurs quartiers.
Ces entreprises illégales sont ainsi bien plus compétitives que les opérateurs légaux, puisqu’elles achètent leur Internet moins cher, ne versent ni une partie de leurs revenus ni la TVA à l’Etat. Les liens Vsat piratés coûtent 1000 dollars de moins que le E1 obtenu à travers l’Etat, alors que les liens radios avec la Turquie sont en général estimés à 600 dollars par mois par E1. Les équipements utilisés par ces compagnies sont également passés en contrebande par terre ou par mer, ce qui les exempte de taxes de douane.
«Quelque part, l’Etat a levé la barre tellement haut en fixant les E1 à des prix exorbitants qu’il encourage indirectement l’essor d’un marché parallèle», signale un troisième spécialiste du secteur. Tous les grands acteurs du marché Internet sont coupables du même crime, accuse un des spécialistes interviewés par Magazine. En effet, même certains FAI légaux qui opèrent de manière mensuelle se fournissent souvent auprès des opérateurs illégaux, à qui ils achètent leur surplus.
Complicités politiques
Mais comment ces FAI illégaux peuvent-ils opérer en toute impunité? Sans exception aucune, tous les spécialistes interviewés par Magazine pointent un doigt accusateur vers les politiques libanais. Un certain nombre d’entre eux également actionnaire de FAI légaux considère le marché illégal comme une source de revenus importants. Dans la plupart des cas, s’accordent à dire les spécialistes, ils s’associent aux opérateurs illégaux en leur conférant l’immunité. «Personne ne peut s’aventurer dans ce marché sans obtenir la protection d’une faction politique ou d’une autre», murmure-t-on. Ainsi, la FAI impliquée dans la fameuse antenne du Barouk, qui obtenait de l’Internet bon marché d’Israël, aurait reçu la protection de nombreux hommes forts de l’époque entre la période allant de 2006 à 2009. «Cela ne veut toutefois pas dire que ces politiques aient nécessairement eu vent de la provenance de cet Internet illégal», tempère le directeur d’une FAI. L’information n’aurait certainement circulé qu’après une certaine période de temps, des plages IP provenant de Tel-Aviv ayant paru chez certains FAI. Dans le cas de l’antenne du Barouk, une entreprise légale n’ayant jamais activé la licence fournie par la ART, aurait fourni de l’Internet à la présidence de la République. «Les administrations gouvernementales impliquées dans ce scandale n’ont pas contrôlé les licences de leurs fournisseurs», remarque-t-on.
Un laisser-aller qui en dit long sur l’approche de l’Etat: «Il suffirait tout simplement de vérifier les revenus et le débit Internet des entreprises en les comparant à la capacité des E1 qui leur ont été octroyés par le ministère des Télécoms pour déceler toute opération de malversation», signale-t-on. Mona Alami pour Magazine
Une véritable économie parallèle caractérise le secteur Internet libanais, où les fournisseurs d’accès Internet (FAI) légaux ne représentent que la partie visible de l’iceberg. En effet, selon des spécialistes du cru, près de 50% des fournisseurs d’Internet au pays du Cèdre opéreraient tranquillement en toute illégalité.
Deux types de fournisseurs existent au Liban. Les FAI (fournisseurs d’accès Internet–ISP en anglais) constituent la passerelle indispensable pour permettre aux utilisateurs de naviguer sur Internet. Les fournisseurs d’accès de données (DSP) disposent de l’infrastructure spécialisée, nécessaire aux ISP pour relier les ordinateurs personnels et les réseaux Internes des entreprises, au réseau mondial. Ce service, qui est payant, transite par le ministère des Télécoms qui le fait facturer au prix fort, près de 3000 dollars pour chaque ligne E1(2Mbps). «Les DSP doivent également verser 20% de leurs revenus au ministère des Télécoms et seule l’Autorité régulatrice des télécoms (ART) peut leur accorder une autorisation de fréquence nécessaire pour installer et opérer un réseau radio de transmission de données servant les FAI ainsi que les banques et les grandes entreprises», assure un spécialiste du secteur.
Ces opérateurs légaux doivent cependant faire face à une âpre concurrence de la part d’une multitude d’opérateurs illégaux. «Ces derniers opèrent en amont ainsi qu’en aval», assure un autre spécialiste. En effet, des individus ou des compagnies se connectent à des lignes Internet de Turquie, de Chypre ou comme ce fût le cas pour l’antenne du Barouk, d’Israël, pays ennemi du Liban. Ce transit est généralement assuré par des liens Vsat ou radio, qui relient le Liban à ces divers pays.
Dans les camps palestiniens
D’autres fournisseurs Internet illégaux existeraient sur le marché local. Ainsi selon le propriétaire d’un FAI libanais, des Vsat auraient été installés dans certains camps palestiniens, à la périphérie de Beyrouth et Tripoli. Les enclaves palestiniennes échappant historiquement au contrôle de l’Etat, elles seraient donc impossibles à démanteler. «Dans ce cas particulier, les FAI ayant recours à ce type de connexion évitent de faire transiter des informations sensibles en raison du risque évident que cela pourrait poser. Elles y font donc appel pour ce qui est des activités de navigation du net», ajoute un informaticien.
Ces gros opérateurs dominant le marché en amont offrent leurs services aux distributeurs illégaux des diverses régions, qui les revendent à leur tour à des préposés ou des compagnies fournissant généralement ce service en jumelage avec celui de la télévision satellite.
Ce scénario se répète au plus bas de l’échelle du système, les petits fournisseurs obtenant également la protection des politiques, à qui ils verseraient une redevance, généralement par le biais des partis régnant dans leurs quartiers.
Ces entreprises illégales sont ainsi bien plus compétitives que les opérateurs légaux, puisqu’elles achètent leur Internet moins cher, ne versent ni une partie de leurs revenus ni la TVA à l’Etat. Les liens Vsat piratés coûtent 1000 dollars de moins que le E1 obtenu à travers l’Etat, alors que les liens radios avec la Turquie sont en général estimés à 600 dollars par mois par E1. Les équipements utilisés par ces compagnies sont également passés en contrebande par terre ou par mer, ce qui les exempte de taxes de douane.
«Quelque part, l’Etat a levé la barre tellement haut en fixant les E1 à des prix exorbitants qu’il encourage indirectement l’essor d’un marché parallèle», signale un troisième spécialiste du secteur. Tous les grands acteurs du marché Internet sont coupables du même crime, accuse un des spécialistes interviewés par Magazine. En effet, même certains FAI légaux qui opèrent de manière mensuelle se fournissent souvent auprès des opérateurs illégaux, à qui ils achètent leur surplus.
Complicités politiques
Mais comment ces FAI illégaux peuvent-ils opérer en toute impunité? Sans exception aucune, tous les spécialistes interviewés par Magazine pointent un doigt accusateur vers les politiques libanais. Un certain nombre d’entre eux également actionnaire de FAI légaux considère le marché illégal comme une source de revenus importants. Dans la plupart des cas, s’accordent à dire les spécialistes, ils s’associent aux opérateurs illégaux en leur conférant l’immunité. «Personne ne peut s’aventurer dans ce marché sans obtenir la protection d’une faction politique ou d’une autre», murmure-t-on. Ainsi, la FAI impliquée dans la fameuse antenne du Barouk, qui obtenait de l’Internet bon marché d’Israël, aurait reçu la protection de nombreux hommes forts de l’époque entre la période allant de 2006 à 2009. «Cela ne veut toutefois pas dire que ces politiques aient nécessairement eu vent de la provenance de cet Internet illégal», tempère le directeur d’une FAI. L’information n’aurait certainement circulé qu’après une certaine période de temps, des plages IP provenant de Tel-Aviv ayant paru chez certains FAI. Dans le cas de l’antenne du Barouk, une entreprise légale n’ayant jamais activé la licence fournie par la ART, aurait fourni de l’Internet à la présidence de la République. «Les administrations gouvernementales impliquées dans ce scandale n’ont pas contrôlé les licences de leurs fournisseurs», remarque-t-on.
Un laisser-aller qui en dit long sur l’approche de l’Etat: «Il suffirait tout simplement de vérifier les revenus et le débit Internet des entreprises en les comparant à la capacité des E1 qui leur ont été octroyés par le ministère des Télécoms pour déceler toute opération de malversation», signale-t-on. Mona Alami pour Magazine
Friday, March 19, 2010
Wikileaks, un site anonyme publiant des rapports confidentiels, représente « une menace potentielle » pour l’armée américaine.

Créé et financé par des journalistes, des quotidiens, et des militants de la liberté d'expression, dont Ralph Nader, ancien candidat à la présidence américaine d’origine libanaise, Wikileaks est un site gratuit, accessible à tous. Il permet à « des taupes » de poster des documents hautement confidentiels, souvent liés à des scandales politiques ou financiers, portant donc atteinte à la sécurité des compagnies internationales et des gouvernements. Un document de 33 pages, préparé en 2008 par le service de contre-espionnage de l'armée américaine se penche sur le fonctionnement de ce site, et les risques qu’il peut entraîner pour les Forces américaines sur le plan national et international.
Il est estimé que Wikileaks représente « une menace potentielle » pour l'armée américaine : les documents publiés sur le site révèlent des informations secrètes, pouvant être utilisées par des services de renseignement étrangers et des organisations terroristes. Le site pourrait être également manipulé à des fins de propagande, par des groupes indépendants ou des états. Le rapport se termine sur une recommandation aux militaires de poursuivre les informateurs et de décrédibiliser Wikileaks. De nombreux pays comme la Chine, Israël, la Russie et la Corée du Nord ont choisi de bloquer l’accès à ce site.
http://wikileaks.org/
Labels:
Armée américaine,
Liban,
Ralph Nader,
Terrorisme,
Wikileaks
Tuesday, March 16, 2010
François Bassil, PDG de la Byblos Bank :«Nous sommes prêts à refinancer la dette»
Le Dr François Bassil, président de la Byblos Bank, l’une des plus importantes institutions financières du Liban, a fait part, récemment, des réticences du secteur bancaire à poursuivre le financement de la dette publique, déclaration qui a provoqué bien des remous. Magazine revient sur le sujet alors que l’examen du budget 2010 est à l’ordre du jour.
Q-Les banques libanaises financeraient près de 58% de la dette publique. Quel danger représente pour elles l’augmentation du risque souverain et comment se reflèterait-t-il sur leur notation dans l’éventualité d’une dégradation du contexte politique?
Les banques libanaises sont des entreprises d’intérêt public qui fonctionnent avec des dépôts publics et sont soumises à des règlementations rigides. Elles jouent donc un rôle primordial dans l’économie et nous tenons à ce que ce secteur demeure en excellente santé! Les banques ont un client majeur, l’Etat, qui est, par définition, très solvable et absorbe aujourd’hui près de 55% de leurs moyens financiers; sa santé est donc une priorité. Nous avons aujourd’hui atteint un pourcentage de crédit à l’Etat que nous ne pouvons pas dépasser. Nous sommes, toutefois, prêts à reconduire le financement de cette dette jusqu’à l’amélioration de l’état de santé de notre client. Evidemment! Une dégradation du risque souverain se répercuterait sur la dette…
Q-De nombreux économistes ont critiqué l’augmentation significative du budget 2010, critiques que vous semblez partager, notamment pour ce qui est de l’augmentation des taxes. Quels sont les points faibles de ce projet de budget? L’absence de réformes est-elle l’une des préoccupations majeures du secteur bancaire?
Nous ne disposons toujours pas de chiffres précis relatifs au budget de 2010, mais je crois savoir que l’augmentation des dépenses ordinaires est de l’ordre de 2 000 milliards de livres libanaises. L’Etat libanais doit faire un grand effort pour remédier à son déséquilibre et mettre fin à la dilapidation des revenus publics. Un autre effort doit être entrepris pour réformer les finances du gouvernement, notamment par des mesures d’austérité et la rationalisation des dépenses. Dans le secteur bancaire, nous sommes prêts à financer les projets d’infrastructure d’intérêt public qui pourraient être ainsi attribués au secteur privé. Mais bien sûr il faut avant tout adopter des mesures de réforme et l’établissement d’une administration probe et active, reposant sur des organismes de contrôle efficaces. Pour ce qui est du secteur de l’électricité, le déficit de l’EDL a atteint 2 300 milliards de livres libanaises l’année passée. Les banques sont prêtes à trouver des investisseurs et à lever les deux ou trois milliards de dollars nécessaires à la refonte du secteur, je n’utilise pas le mot privatisation dans ce cas, mais de concession, type BOT (Build, Operate, Transfer) avec des actifs qui reviendraient à l’Etat après une certaine période. Le gouvernement s’obstine cependant à investir directement, en attendant de voir plus tard! Je crois que près de 80% des Libanais sont en mesure de faire face à une augmentation des coûts de l’électricité, d’autant que la plupart d’entre eux ont recours à des distributeurs privés. Mis à part le secteur de l’électricité, des économies doivent être réalisées au niveau des différents ministères. En 2009, les recettes totales ont connu une croissance de 25%, rapidement absorbée par l’augmentation des dépenses. La hausse des impôts est évidemment destinée à éviter une aggravation de la dette mais nous sommes d’avis que les dépenses ne doivent pas être augmentées, mais rationnalisées.
Q-Le Premier ministre Saad Hariri a inscrit dans le budget 2010 de nombreux projets de développement, ce qui contribue en partie à gonfler le déficit, estimé à quatre milliards de dollars. Vous avez fait part des réticences du secteur bancaire à financer ce déficit par l’achat de bons de Trésor. Quels seraient les autres outils économiques à la disposition du gouvernement?
Je suis favorable à des dépenses d’investissements mais, encore une fois, certaines réformes entreprises par l’Etat pourraient passer par le secteur privé, comme je l’ai énuméré plus haut. Et cela pour éviter d’alourdir la dette. En effet, les prêts prévus par la conférence de Paris III, bien qu’avantageux, restent tout de même des prêts.
Q-Le financement massif de la dette par les banques libanaises se répercuterait-il négativement sur leur expansion à l’étranger ainsi que sur le niveau de crédits qu’ils accorderaient aux entreprises?
Jusqu’à présent, il n’y a pas eu d’impact direct sur le crédit accordé aux entreprises par les banques libanaises, en raison de l’augmentation substantielle du niveau des dépôts l’année précédente, qui était de l’ordre de près de 20%, alors que les crédits au secteur privé ont connu une croissance de 14%. Il n’y a donc pas assez de projets privés, notamment en raison de certains obstacles administratifs. Les trois milliards de dollars d’investissements étrangers reçus par le Liban en 2009 se sont orientés pour la plupart vers le secteur immobilier qui n’est pas un secteur producteur d’emplois. Ces investissements sont aussi très inégaux à travers les régions libanaises. Cependant, il est certain que l’excédent dont jouissent les banques libanaises, en partie grâce à la confiance de nos clients libanais et étrangers, favorise notre expansion à l’étranger et la stabilité politique va encourager les investissements étrangers au Liban.
Q-Le divorce à l’amiable du duo Audi-Hermes est-il le reflet de la politique de la Banque centrale qui verrait ainsi d’un mauvais œil toute fusion entre les banques libanaises et des institutions étrangères?
Pas nécessairement. Il est vrai que dans le cas où une société étrangère tente d’imposer sa politique de crédit à une banque libanaise, la banque centrale se doit d’intervenir, afin de protéger les intérêts des épargnants libanais. Il se peut aussi qu’un désaccord sur la stratégie d’expansion à adopter ait entrainé cette décision.
Q-De moins en moins d’opérations de fusions-acquisitions ont lieu sur le marché local qui est dominé par de grandes banques parfaitement déployées sur l’intégralité du territoire. Quelle valeur ajoutée peuvent apporter de petites institutions aux banques Alpha?
Je crois que le scénario le plus probable résiderait dans une consolidation du secteur avec des opérations de fusion entre les petites banques, ce qui permettrait une facilitation des opérations de tutelle et une plus grande concentration du secteur. Le ralentissement des opérations de fusions peut, sans doute, être attribué à la structure même des banques libanaises, pour la plupart des banques familiales, dont les propriétaires craignent une dilution de leur pouvoir. Mais un jour, il n’y aura plus de succession possible ce qui favorisera les opérations de fusion. Il devient également de plus en plus coûteux de gérer une banque, notamment pour ce qui est de l’apport des nouvelles technologies et du capital humain ainsi que du risque de gouvernance, ce qui pourrait favoriser également la tendance. Pour les banques importantes, ce type de fusion avec de petites institutions représente peu d’intérêt.
Q-La banque Byblos a récemment annoncé l’ouverture d’une nouvelle succursale à Bagdad. Quelles opportunités représente le marché irakien, toujours très instable, pour les banques libanaises?
L’Irak représente un marché extrêmement prometteur, c’est une économie considérable de près de 30 millions d’habitants qui dispose des deuxièmes réserves de pétrole au monde. Une fois sa stabilité assurée, l’Irak offrira d’énormes opportunités aux banques étrangères étant donné que le secteur reste très fractionné et sous capitalisé. Nous collaborons depuis très longtemps avec l’Irak. Nous avons ouvert une branche à Irbil et une autre à Bagdad et nous prévoyons prochainement l’ouverture de deux autres succursales, l’une dans la ville de Najaf et l’autre à Bassora. Propos recueillis par M. A. pour Magazine du 12 Mars 2010.
Q-Les banques libanaises financeraient près de 58% de la dette publique. Quel danger représente pour elles l’augmentation du risque souverain et comment se reflèterait-t-il sur leur notation dans l’éventualité d’une dégradation du contexte politique?
Les banques libanaises sont des entreprises d’intérêt public qui fonctionnent avec des dépôts publics et sont soumises à des règlementations rigides. Elles jouent donc un rôle primordial dans l’économie et nous tenons à ce que ce secteur demeure en excellente santé! Les banques ont un client majeur, l’Etat, qui est, par définition, très solvable et absorbe aujourd’hui près de 55% de leurs moyens financiers; sa santé est donc une priorité. Nous avons aujourd’hui atteint un pourcentage de crédit à l’Etat que nous ne pouvons pas dépasser. Nous sommes, toutefois, prêts à reconduire le financement de cette dette jusqu’à l’amélioration de l’état de santé de notre client. Evidemment! Une dégradation du risque souverain se répercuterait sur la dette…
Q-De nombreux économistes ont critiqué l’augmentation significative du budget 2010, critiques que vous semblez partager, notamment pour ce qui est de l’augmentation des taxes. Quels sont les points faibles de ce projet de budget? L’absence de réformes est-elle l’une des préoccupations majeures du secteur bancaire?
Nous ne disposons toujours pas de chiffres précis relatifs au budget de 2010, mais je crois savoir que l’augmentation des dépenses ordinaires est de l’ordre de 2 000 milliards de livres libanaises. L’Etat libanais doit faire un grand effort pour remédier à son déséquilibre et mettre fin à la dilapidation des revenus publics. Un autre effort doit être entrepris pour réformer les finances du gouvernement, notamment par des mesures d’austérité et la rationalisation des dépenses. Dans le secteur bancaire, nous sommes prêts à financer les projets d’infrastructure d’intérêt public qui pourraient être ainsi attribués au secteur privé. Mais bien sûr il faut avant tout adopter des mesures de réforme et l’établissement d’une administration probe et active, reposant sur des organismes de contrôle efficaces. Pour ce qui est du secteur de l’électricité, le déficit de l’EDL a atteint 2 300 milliards de livres libanaises l’année passée. Les banques sont prêtes à trouver des investisseurs et à lever les deux ou trois milliards de dollars nécessaires à la refonte du secteur, je n’utilise pas le mot privatisation dans ce cas, mais de concession, type BOT (Build, Operate, Transfer) avec des actifs qui reviendraient à l’Etat après une certaine période. Le gouvernement s’obstine cependant à investir directement, en attendant de voir plus tard! Je crois que près de 80% des Libanais sont en mesure de faire face à une augmentation des coûts de l’électricité, d’autant que la plupart d’entre eux ont recours à des distributeurs privés. Mis à part le secteur de l’électricité, des économies doivent être réalisées au niveau des différents ministères. En 2009, les recettes totales ont connu une croissance de 25%, rapidement absorbée par l’augmentation des dépenses. La hausse des impôts est évidemment destinée à éviter une aggravation de la dette mais nous sommes d’avis que les dépenses ne doivent pas être augmentées, mais rationnalisées.
Q-Le Premier ministre Saad Hariri a inscrit dans le budget 2010 de nombreux projets de développement, ce qui contribue en partie à gonfler le déficit, estimé à quatre milliards de dollars. Vous avez fait part des réticences du secteur bancaire à financer ce déficit par l’achat de bons de Trésor. Quels seraient les autres outils économiques à la disposition du gouvernement?
Je suis favorable à des dépenses d’investissements mais, encore une fois, certaines réformes entreprises par l’Etat pourraient passer par le secteur privé, comme je l’ai énuméré plus haut. Et cela pour éviter d’alourdir la dette. En effet, les prêts prévus par la conférence de Paris III, bien qu’avantageux, restent tout de même des prêts.
Q-Le financement massif de la dette par les banques libanaises se répercuterait-il négativement sur leur expansion à l’étranger ainsi que sur le niveau de crédits qu’ils accorderaient aux entreprises?
Jusqu’à présent, il n’y a pas eu d’impact direct sur le crédit accordé aux entreprises par les banques libanaises, en raison de l’augmentation substantielle du niveau des dépôts l’année précédente, qui était de l’ordre de près de 20%, alors que les crédits au secteur privé ont connu une croissance de 14%. Il n’y a donc pas assez de projets privés, notamment en raison de certains obstacles administratifs. Les trois milliards de dollars d’investissements étrangers reçus par le Liban en 2009 se sont orientés pour la plupart vers le secteur immobilier qui n’est pas un secteur producteur d’emplois. Ces investissements sont aussi très inégaux à travers les régions libanaises. Cependant, il est certain que l’excédent dont jouissent les banques libanaises, en partie grâce à la confiance de nos clients libanais et étrangers, favorise notre expansion à l’étranger et la stabilité politique va encourager les investissements étrangers au Liban.
Q-Le divorce à l’amiable du duo Audi-Hermes est-il le reflet de la politique de la Banque centrale qui verrait ainsi d’un mauvais œil toute fusion entre les banques libanaises et des institutions étrangères?
Pas nécessairement. Il est vrai que dans le cas où une société étrangère tente d’imposer sa politique de crédit à une banque libanaise, la banque centrale se doit d’intervenir, afin de protéger les intérêts des épargnants libanais. Il se peut aussi qu’un désaccord sur la stratégie d’expansion à adopter ait entrainé cette décision.
Q-De moins en moins d’opérations de fusions-acquisitions ont lieu sur le marché local qui est dominé par de grandes banques parfaitement déployées sur l’intégralité du territoire. Quelle valeur ajoutée peuvent apporter de petites institutions aux banques Alpha?
Je crois que le scénario le plus probable résiderait dans une consolidation du secteur avec des opérations de fusion entre les petites banques, ce qui permettrait une facilitation des opérations de tutelle et une plus grande concentration du secteur. Le ralentissement des opérations de fusions peut, sans doute, être attribué à la structure même des banques libanaises, pour la plupart des banques familiales, dont les propriétaires craignent une dilution de leur pouvoir. Mais un jour, il n’y aura plus de succession possible ce qui favorisera les opérations de fusion. Il devient également de plus en plus coûteux de gérer une banque, notamment pour ce qui est de l’apport des nouvelles technologies et du capital humain ainsi que du risque de gouvernance, ce qui pourrait favoriser également la tendance. Pour les banques importantes, ce type de fusion avec de petites institutions représente peu d’intérêt.
Q-La banque Byblos a récemment annoncé l’ouverture d’une nouvelle succursale à Bagdad. Quelles opportunités représente le marché irakien, toujours très instable, pour les banques libanaises?
L’Irak représente un marché extrêmement prometteur, c’est une économie considérable de près de 30 millions d’habitants qui dispose des deuxièmes réserves de pétrole au monde. Une fois sa stabilité assurée, l’Irak offrira d’énormes opportunités aux banques étrangères étant donné que le secteur reste très fractionné et sous capitalisé. Nous collaborons depuis très longtemps avec l’Irak. Nous avons ouvert une branche à Irbil et une autre à Bagdad et nous prévoyons prochainement l’ouverture de deux autres succursales, l’une dans la ville de Najaf et l’autre à Bassora. Propos recueillis par M. A. pour Magazine du 12 Mars 2010.
Labels:
Audi,
Banque Centrale,
Banques Libanaises,
Bassil,
Bons du Trésor,
EFG-Hermes,
Irak,
Liban
Saturday, March 13, 2010
Les choix d’Israël: attaquer l’Iran, ou faire la paix avec la Syrie, selon Patrick Seale, spécialiste britannique du Moyen-Orient
De passage au Liban pour le lancement de son nouveau livre Riad el-Solh: la lutte pour l’indépendance, Patrick Seale, journaliste britannique et spécialiste du Moyen-Orient, a accordé une interview à Magazine consacrée à la situation politique au Liban et dans l’ensemble de la région.
Q-Quelle est votre analyse de la politique étrangère du président américain Barack Obama, surtout sur la question du Moyen-Orient? Pensez-vous qu’elle sera plus efficace que celle adoptée sous le mandat du président George Bush?
R-Je crois que tout le monde a été déçu par le président Barack Obama, porteur de grands espoirs au lendemain de son élection à la présidence américaine. Il a été certainement distrait par ses problèmes domestiques et l’obstruction systématique de ses initiatives politiques moyenne-orientales par le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu. Ses premières décisions portant sur la région ont été de nommer George Mitchell (l’envoyé spécial pour le Proche-Orient) et de demander le gel de la colonisation israélienne des territoires occupés. Mais cette dernière initiative s’est avérée impossible. Pour ce qui est de la guerre contre le terrorisme, Obama a fini par adopter la même stratégie que son prédécesseur, en étendant le champ de la lutte. Il a également tendu la main à l’Iran, mais cette approche n’a pas été couronnée de succès. Pour sa défense, on peut dire qu’il n’en est toujours qu’à sa première année de mandat présidentiel. Il a donc toujours la possibilité de renverser la tendance, mais je crois cela peu probable, en raison de la forte contestation de l’establishment américain.
Q-Quels sont les puissances régionales qui ont su le mieux tirer profit de ce changement de la politique américaine?
R-Il faut admettre que deux puissances moyennes-orientales ont été particulièrement actives dernièrement: en premier lieu la Turquie, qui a lancé une grande offensive de paix tout en se rapprochant de la Syrie, du Liban, de l’Irak et de l’Iran. Elle a également rejeté toute action militaire contre ce dernier pays. C’est l’unique puissance militaire qui soit bien perçue en Afghanistan et c’est le pays qui a servi de médiateur pour les négociations entre Israël et la Syrie. La seconde puissance que l’on pourrait citer est le Qatar, qui a négocié les accords de Doha ainsi que ceux conclus entre le Soudan et le Tchad, concernant la région du Darfour.
Q-Pensez vous qu’une attaque israélienne contre l’Iran soit vraiment possible? La situation au Moyen-Orient est-elle aujourd’hui aussi dangereuse qu’on serait tenté de le croire?
R-La situation est en effet très volatile: les Israéliens tentent de provoquer une attaque contre l’Iran. Je crois qu’ils prévoiraient de mener une action contre l’Iran qui entraînerait une riposte de ce dernier visant les bases américaines dans le Golfe. La situation est donc très sérieuse, les pays du Golfe étant sur la ligne de feu. Les Israéliens ont aujourd’hui l’impression que leur hégémonie dans la région est en danger. Alors que, durant ces dernières soixante années, les pays arabes n’ont pu contenir la puissance d’Israël, la montée de certains acteurs non-étatiques, comme le Hamas et le Hezbollah d’une part, ainsi que de l’Iran, d’autre part, a permis de modifier la balance des forces au Moyen-Orient. Israël pourrait dont tenter de s’extraire de cette situation soit par une attaque contre l’Iran, ou bien en faisant la paix avec la Syrie.
Q-Quel est le danger d’une guerre entre Israël et le Liban?
R-Une guerre est toujours extrêmement difficile à prévoir. Celle de 2006 a démontré les limites de la défense d’Israël qui a toujours eu pour politique de mener la guerre en territoire ennemi, ce qui n’a pas été le cas lors du dernier conflit (le territoire israélien a en effet été bombardé par le Hezbollah, ndlr). Il se peut, cette fois, que la Syrie et l’Iran interviennent dans l’éventualité d’un nouveau conflit, car ils se trouveraient en danger. Toutefois, pour ces pays, le Hezbollah demeure la ligne de première défense. Netanyahu préfèrerait certainement garder le statu quo actuel, ce qui pourrait cependant s’avérer difficile pour lui. En effet, Israël se trouve sous pression depuis l’assassinat de Mahmoud Mabhouh (un haut responsable du Hamas, ndlr) à Dubaï et le scandaleux siège de Gaza, deux événements qui ont particulièrement terni son image. Les Israéliens sont aussi obsédés par l’Iran et par son programme nucléaire, que personne ne semble pouvoir arrêter. Ils tentent donc d’influencer la communauté internationale, mais inévitablement le Hezbollah fait partie de la défense iranienne.
Q-Dans quelle situation se trouve le Hezbollah aujourd’hui au Liban? Est-il le grand gagnant de la lutte de pouvoir ayant suivi l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri?
R-Le Hezbollah et ses alliés, notamment le Courant patriotique libre (CPL), sont une force dominante au Liban. Depuis que le Liban a réussi à atteindre une certaine stabilité politique, les autres factions ont dû apprendre à gérer cette nouvelle réalité. Il est néanmoins certain que l’idée selon laquelle le Liban pourrait être utilisé contre la Syrie a dû être abandonnée.
Q-Que pensez-vous des articles parus dans certains médias étrangers faisant état d’une possible expansion des activités du Hezbollah en Egypte et au Yémen? Croyez-vous que la lutte secrète opposant le Hezbollah à Israël ait remplacé, pour le moment du moins, l’éventualité d’une guerre conventionnelle?
R-Ces accusations sont peu crédibles: la lutte du Hezbollah contre Israël est avant tout nationale, c’est un mouvement qui est né de l’oppression subie par les habitants du Liban-Sud. Par ailleurs, il est scandaleux que l’Egypte se soit alignée sur Israël en bloquant les tunnels connectant Gaza à l’Egypte, un pays qui était le bastion du nationalisme arabe. La guerre souterraine a de tout temps été pratiquée par Israël qui, dans les années soixante-dix, avait recours au terrorisme étatique pour poursuivre ses ennemis.
Q-Quel est l’état des relations libano-syriennes, aujourd’hui, et comment le régime de Damas perçoit-il le Liban?
R-Les relations qu’entretiennent ces deux pays se sont certainement assainies récemment. La Syrie et le Liban sont deux pays indépendants, unis par des liens familiaux et des intérêts économiques communs. Le dicton ne dit-il pas après tout: un peuple, deux nations? Le divorce entre la Syrie et le Liban ne saurait donc avoir lieu et Damas ne peut, en aucun cas, tolérer un gouvernement hostile si près de sa capitale.
Q-On dit que la tutelle syrienne sur le Liban a été progressivement remplacée par une coalition syro-iranienne et arabe, depuis le retrait syrien…
R-En effet, la carte politique bouge constamment. Mais la relation entre la Syrie et l’Iran date de plus de trente ans, alors que les liens du Liban à la Syrie sont vieux de centaines d’années. Nous avons assisté à la montée de la communauté chiite qui a supporté le poids de l’occupation et constitue un élément important de la mosaïque libanaise. Mais le Liban a toujours été une sorte de mosaïque…
Q-Quel symbolisme attacher à la réunion de Damas entre le président iranien Mahmoud Ahmadinajad, le président syrien Bachar al-Assad et le chef du Hezbollah sayyed Hassan Nasrallah?
R-Le message est on ne peut plus clair: les participants à cette conférence ne peuvent être utilisés les uns contre les autres et la Syrie ne peut accepter un traité de paix séparé. Propos recueillis par Mona Alami( Magazine 12 Mars 2010)
Encadré
Patrick Seale est un journaliste de renommée internationale, spécialiste des questions du Moyen-Orient. Il a rédigé de nombreux ouvrages dont Assad de Syrie: La lutte pour le Moyen-Orient et une biographie d’Abou Nidal, un dissident du Fateh qui s’est rendu célèbre pour ses opérations terroristes. Né en Irlande, il a fait ses études au Collège Saint-Antoine d’Oxford. Il a par la suite travaillé pour l’agence de presse Reuters et le quotidien britannique The Observer.
Wednesday, March 10, 2010
« Les ennemis d’hier sont les alliés de demain »
La Montagne Druze est en effervescence : Walid Joumblat visite régulièrement les villages les plus reculés à l’occasion des enterrements des membres de sa communauté, chose inhabituelle pour le leader, qui par le passé, se cantonnait aux familles les plus illustres. On attribue ce soudain regain d’intérêt par la prise de conscience de Joumblatt d’un affaiblissement de sa popularité, en raison de l’abandon des principes indépendantistes, qu’il avait prônés depuis 2005. Lors de sa dernière visite à la région du Metn, il aurait conseillé à certaines grandes familles de voter pour son nouvel allié du Courant Patriotique Libre, le général Michel Aoun.
Publié dans Magazine le 5 Mars 2010
Publié dans Magazine le 5 Mars 2010
Friday, February 19, 2010
Contestation chez les Druzes

Un malaise de plus en plus palpable s’est installé dans la communauté druze depuis le désaveu par son chef, Walid Joumblat, du mouvement indépendantiste du 14 Mars, et son rapprochement avec le Hezbollah et la Syrie.
Le linge se lave en famille, mais, ce soir à Aley, une des plus grandes agglomérations druze du Liban, la communauté raconte son « humiliation ». Pour la première fois, les membres de cette petite communauté de près de 250,000 membres livrent leur déception face au volte face spectaculaire de leur leader Walid Joumblat. Ce dernier, règne en chef incontesté sur la montagne, depuis l’assassinat de son père Kamal en 1977, par les Syriens.
En 2005, à la suite de l’assassinat du premier ministre Rafic Hariri le 14 Février, un crime largement imputé à la Syrie, Joumblat prend la tête du mouvement anti-Syrien du 14 Mars dans sa révolte contre le pouvoir de Damas. Un soulèvement pacifiste qui met fin, en Avril 2005, à une occupation vieille de 30 ans. Joumblat, alors sûr du soutien américano-européen multiplie les invectives à l’encontre des hommes forts de Damas et de leurs alliés libanais dont le Hezbollah.
« Nous étions plein de fierté de voir notre leader s’imposer dans ce combat viscéral contre la Syrie, préservant notre indépendance et pavant la voie à l’établissement d’un état fort », raconte Naji Alamé, un ancien combattant druze ayant participé à la guerre de 83 entre Druzes et Chrétiens.
Pour un membre de Parti Socialiste Progressiste- PSP- (dirigé par Joumblat), le mouvement du 14 Mars était une sorte d’assurance-vie protégeant la communauté et sa descendance, cette minorité ne pouvant survivre qu’à l’ombre d’un état séculier.
Ce 14 février 2010, près de cinq ans après le rassemblement monstre du 14 mars durant lequel 1,5 millions de personnes ont scandé « la Syrie dehors », le chef du PSP visite la tombe du premier ministre assassiné, Place des Martyrs, prenant rapidement congé, contrairement à son habitude, en laissant derrière lui, son fils et ses ministres Akram Chehayeb et Wael Abou Faour. « Nous n’avons pas été mobilisés pour participer à la manifestation contrairement aux années précédentes», signale un membre du PSP. Une voiture circulant à Aley avec des posters de Rafic Hariri aurait même été interceptée par la police municipale, proche du PSP.
Certains milieux druzes influents jugent la désaffection de Joumblat, prévisible. « Sa visite au tombeau de Hariri fut une formalité, faite uniquement pour rassurer Saad Hariri( l’actuel premier ministre libanais), qui serait un grand pourvoyeur de fonds pour les œuvres caritatives de la famille Joumblat soutenant les Cèdres du Chouf et le festival de Beiteddine», murmure-t-on.
« Joumblat n’a pas été le grand absent de la Place des Martyrs, il a tout simplement fait son devoir d’amitié envers Rafic Hariri et son fils Saad, sans plus », répond le député et ancien ministre Marwan Hamadé. Cela n’était une surprise pour personne, puisque les prémices de cette participation dans sa forme et ses limites étaient apparues progressivement depuis le 7 juin 2009, c'est-à-dire au soir des élections législatives», assure le député. Ce dernier reconnait que la mouvance du 14 Mars, qui s’était habituée à la présence active de Joumblat, a sans doute été déçue de ne pas l’entendre à la tribune. Joumblat aurait donc tourné la page du 14 Mars sans pour autant en renier les acquis, au nombre desquels figurent le tribunal spécial pour le Liban, l’instauration de relations diplomatiques avec la Syrie, la formation du cabinet d’union nationale ainsi que l’apaisement relatif du climat confessionnel.
« Ce bouleversement », ajoute Hamadé en commentant la position de Joumblat, «laisse évidemment des blessures dans les esprits et des perturbations dans les équilibres politiques. Mais il faut comprendre Joumblat : j’ai vécu avec lui la première épreuve de Mai- Juin 77- après l’assassinat de son père Kamal- lorsqu’il décidât, pour des raisons liées à la sécurité de la montagne et la survie de ce qui restait de la gauche libanaise, de prendre le chemin de Damas. Je le comprends sur le fond. Sur la forme, si je trouve à redire, c’est à lui que je m’adresserais », ajoute le député.
Tarek Radwan, un habitant de Aley s’indigne de la position délicate dans laquelle les Druzes se trouvent aujourd’hui. « Nous ne sommes plus des interlocuteurs crédibles aux yeux des autres communautés. Joumblat a commencé par s’attaquer aux chrétiens qu’il a qualifiés de « mauvaise graine ». Il se met maintenant à dos la communauté sunnite », s’insurge le jeune homme.
Sa femme, Suzanne, une inconditionnelle du leader druze, se demande cependant, où était passé son vote, en faisant référence à l’opposition affichée par le PSP contre le Hezbollah, accusé d’être un état dans l’état, lors des élections législatives de 2009.
« Le Hezbollah n’a même pas présenté des excuses pour les événements du 7 Mai. Nous avons perdu de nombreux jeunes lors des combats de Choueifat, alors que d’autres à l’instar de Bachir Chehayeh, Majd Zahalan et Rabih Mrad étaient kidnappés ici même à Aley », se souvient ce membre du PSP. Le 7 Mai le Hezbollah a tenté d’investir les régions druzes de Aley Choueifat et du Chouf, ainsi que la ville de Beyrouth, attaque ayant mené à des batailles entre les deux camps. D’autres tels M. Radwan ne comprennent pas la position jusqu’au-boutiste de Walid Joumblat. « La réconciliation était sans doute nécessaire, mais les concessions accordées par Joumblat au Hezbollah et à la Syrie n’ont pas été réciproques, il ne fallait pas pour autant se mettre à genoux », signale-t-il, en faisant allusion au retard dans le rendez-vous demandé par Joumblat en Syrie, étape qui permettrait de clore le chapitre de la réconciliation.
Certains comme Wael Hassan croient à un calcul de la part du leader Druze. « Joumblat a choisi de se tourner vers le centre, position tout à fait honorable. Il a choisi le chemin de la réconciliation en faisant il est vrai certaines concessions. Mais si elles ne sont pas accompagnées par des gestes conciliants de la part de l’autre bord, Joumblat reviendrait sans doute à ses positions antérieures », explique-t-il.
Certains milieux influents druzes ne se montrent pas aussi compréhensifs. Ils parlent d’un véritable sentiment d’humiliation qui porterait sur la forme même des nouvelles positions affichées, d’autres politiciens avant Joumblat ayant opéré des rajustements politiques douloureux sans aller aussi loin dans les concessions. « Les Druzes qui s’opposent à cette volte-face ne veulent pas d’un Walid Joumblat humilié, car son humiliation les affecte personnellement, en raison du fort sentiment clanique qui règne dans la communauté et de son identification au Zaim ou au Bey », estime-t-on.
Ce sentiment entraîne un manque de confiance dans la vision de leur chef, vision jugée infaillible, Joumblat étant souvent décrit par ses supporters comme possédant « des antennes lui permettant de percevoir l’avenir ».
« Alors qu’ils attribuaient auparavant ces retournements à la sensibilité à fleur de peau de Joumblat, ils se demandent aujourd’hui s’ils ne se s’étaient tout simplement pas trompés, c’est un vrai dilemme pour tout le monde », confie-t-on.
Le malaise des Druzes se ressentirait jusque dans les réunions du PSP, bastion de la famille Joumblat. « Les réunions ayant eu lieu la semaine passée à Aley, n’ont rassemblé que quelques dizaines de participants alors que plus d’une centaine y étaient conviés », dixit le membre du PSP.
M. Alamé estime que de nombreux Druzes ont décidé de quitter le navire piloté par Joumblat. « Nous ne sommes pas des moutons », s’indigne le membre du PSP qui ajoute que pour la première fois la communauté a violemment contesté les prises de positions de Joumblat.
« Walid Joumblat a lui-même reconnu l’existence d’un malaise mais la configuration politique et sociale de la communauté me porte à croire qu’elle préférera préserver son unité», précise toutefois M. Hamadé.
Hamadé a lui décidé de rester fidèle au Rassemblement Démocratique tout en restant attaché au 14 Mars et « à ce qu’il représente pour une majorité des libanais et surtout pour une jeunesse qui aime cette foule bigarrée et multiconfessionnelle ayant lancé la Révolution du Cèdre ». « Le Liban peut se targuer d’être le défenseur de nos causes nationales en tête desquelles figure la Palestine. Il faut cependant que le Liban survive pour assumer son rôle qui n’est pas seulement de servir de chair à canon à tous les systèmes dictatoriaux ou intégristes de la région.
Dans un pays où le sentiment communautaire est plus fort que tout, tout nouveau danger, réel ou imaginaire, pousserait les Druzes à se ranger derrière leur leader, à moins qu’une nouvelle mouvance, moins entachée par les jeux de la politique libanaise ne prenne la relève…En espérant l’avènement d’un nouveau chef qui réponde mieux aux attentes de la communauté…
Mona Alami, Magazine du 19 Février
Labels:
14 Février,
14 Mars,
7 Mai,
Druzes,
Hezbollah,
Kamal Joumblat,
Liban,
Marwan Hamadé,
Rafic Hariri,
Sunnites,
Syrie,
Walid Joumblat
Qui a voulu assassiner Mahmoud Mabhouh?

20 Janvier: le corps de Mahmoud Mabhouh, un haut responsable du Hamas palestinien est retrouvé électrocuté dans une chambre d’hôtel à Dubaï. Qui était Mabhouh et quelles seront les répercussions régionales de son assassinat, un meurtre largement imputé à Israël? Magazine a interviewé, depuis Dubaï, le Dr Magnus Ranstorp, directeur au Collège National Suédois de la Recherche pour la Défense.
Quel était le rôle de Mabhouh au sein du Hamas?
Son élimination rappelle étrangement celle de Imad Moughnieh, le chef militaire du Hezbollah assassiné à Damas en 2008…
Mabhouh était un des cofondateurs du mouvement miliaire du Hamas. Connu pour son passé d’activiste contre les Israéliens, il aurait notamment été impliqué dans l’enlèvement et le meurtre de deux soldats israéliens Ilan Sa'adon and Avi Sasportas en 1989, ainsi que dans l’assassinat de certains Palestiniens, lors de la première Intifada. Il jouait un rôle prépondérant dans « l’axe Iran-Gaza » et était également responsable de l’acheminement des armes vers les territoires palestiniens. Personnage assez semblable à Moughnieh, il occupait un poste important au sein du Hamas depuis plus de vingt ans et jouait le rôle d'intermédiaire entre les Palestiniens, les services de renseignement Iraniens et les forces spéciales al Quds, (relevant des gardiens de la révolution islamique).
Quel genre de relations Mabhouh entretenait-il avec la Syrie?
Il appartenait à la deuxième garde du Hamas comme Moussa Abu Marzouk (vice député du politbureau du parti), Mohammad Nazzal (un dirigeant du Hamas), qui était également proche de Imad Alami, un autre commandant du Hamas qui fut expulsé de Gaza en 1991, avant la vague de déportation de 1992, pratiquée à l’encontre de 415 membres de ce même parti ainsi que du Jihad islamique palestinien. Sa mouvance, à l’instar des autres cadres du Hamas (en Syrie), est soumise au contrôle des services de renseignements syriens et assujettie aux services de renseignements iraniens.
Quelle était la nature des relations entre Mabhouh et le Hezbollah?
Il entretenait des relations directes avec le Hezbollah mais aussi par le biais de Oussama Hamdane (représentant du Hamas au Liban), qui était autrefois le représentant du Hamas en Iran.
L’assassinat de Mabhouh serait-il une preuve supplémentaire de la guerre secrète opposant Israël au Hezbollah et au Hamas? Entraînera-t-il une coopération accrue entre les deux partis islamiques?
La coopération entre le Hamas et le Hezbollah date des années 1992. Cette relation s’est consolidée au cours des ans et s’est affermie après l’assassinat de Cheikh Ahmad Yassine et de Abdel Aziz Rantissi (Rantissi était un haut dirigeant du Hamas qui fut assassiné par les Israéliens en 2004, un mois après le meurtre de Cheikh Yassine, chef spirituel du parti islamique). Le soutien apporté par le Hezbollah au Hamas serait surtout de nature technique notamment au niveau du perfectionnement des roquettes Qassam. La coopération entre le Hamas et l’Iran s’est accélérée durant ces dernières années: un membre du corps des gardes révolutionnaires iraniens a même été appréhendé à Gaza. Bien qu’initialement le Hamas ait éprouvé des réticences à devenir un outil aux mains de l’Iran (comme le Jihad Islamique avant lui), la donne a toutefois changé depuis la guerre de Gaza (en 2008).
Quelles raisons auraient motivé le voyage de Mabhouh à Dubaï? On a évoqué une possible rencontre avec des responsables iraniens…
Mabhouh avait la possibilité de se rendre directement en Iran depuis la Syrie. Il n’était donc pas dans l’obligation de visiter Dubaï à cette fin. Il a pu tomber dans un traquenard monté par les Israéliens ou les Palestiniens.
Quelle sera la réponse du Hamas à cet assassinat? La vengeance du parti mènera-t-elle à une opération conjointe avec le Hezbollah?
Le Hamas a menacé de viser les intérêts israéliens à l’étranger, ce qui serait un changement du Modus operandi du parti. Le parti islamique sera certainement sous pression pour répondre, comme à la suite des assassinats de Rantissi et de Yassine, mais tout dépend des résultats de l’enquête et des factions qui y seront impliquées. Le Hezbollah avait, lui, tenté d’enlever le chef d’état-major israélien (Gaby Ashkenazi en 2009, à la suite de l’assassinat de Moughnieh) et le Hamas répondra sans doute au meurtre de Mabhouh, en tentant une frappe chirurgicale visant des politiciens ou des officiels israéliens. Ce scénario semble être le plus probable. Dans ce cas le soutien du Hezbollah au Hamas serait de nature technique ou au niveau du ciblage. Publié dans Magazine le 12 Février.
Subscribe to:
Posts (Atom)